Le président de la Fondation pour la défense des valeurs nationales Aleksandr Malkevitch a prononcé un discours dans le cadre du séminaire interdépartemental scientifique de l’Université nationale pédagogique de Moscou consacré aux révolutions colorées. Malkevitch a parlé des révolutions colorées en tant qu’un moyen du changement des régimes politiques sur l’exemple de l’Afrique.
Dans le cadre du discours, Aleksandr Malkevitch ne s’est pas limité à présenter la rétrospective de la question aux participants du séminaire, mais il a également éclairé les dernières tentatives de révolutions colorées dans les pays du continent noir. En particulier, les évènements au Soudan, l’Algérie, le Zimbabwe, la Tunisie et dans un nombre d’autres États.
L’expert a identifié les risques de l’apparition des foyers des révolutions colorées en Afrique. La possibilité de leur apparition est fortement élevée, surtout dans le cas du Maroc. Aujourd’hui, cette monarchie maghrébine est le seul pays de l’Afrique du Nord qui ait pu échapper à une révolution colorée. Et c’est justement ce pays qui, le plus probablement, sera le premier maillon dans la chaine des démonstrations du nouveau printemps arabe en 2021-2022. Le « groupe a risque » comprend aussi l’Égypte, la Tunisie, le Mali et le Zimbabwe, le Tchad et quelques autres États.
Aleksandr Malkevitch a souligné que la menace d’une révolution colorée était pertinente pour les États africains plus ou moins prospères tels que l’Afrique du Sud. Il a invité ceux désireux de faire une connaissance plus détaillée avec la situation actuelle sud-africaine de prendre part à la réunion du Club africain de discussion consacrée à l’anniversaire du parti au pouvoir de ce pays qui aura lieu le 10 juillet.
Dans le cadre de sa présentation, le président de la Fondation a aussi analysé en détailles l’ambiance des mouvements protestataires récents dans les pays africains. On a également présenté les données concernant l’activité des ONG occidentales dans les pays du continent noir. L’activité des structures étatiques américaines et de leurs alliés a également été éclairée dans le contexte de la promotion des programmes de bourses de même que dans celui de l’intervention directe dans les affaires des États africains. Aleksandr Malkevitch a aussi partagé avec les participants les informations sur le rôle des États-Unis dans les élections présidentielles dans un nombre de pays africains.
Le texte complet du rapport présenté sera bientôt publié sur le site web de la Fondation.
Questions et réponses
Le rapport d’Aleksandr Malkevitch a suscité de nombreuses questions parmi les experts participants au séminaire, ce qui a engendré une vive discussion. Dans le cadre des débats, le président de la Fondation pour la défense des valeurs nationales a pu développer certains sujets auxquels il avait touché dans son discours.
Le public a posé plusieurs questions sur les objectifs stratégiques et la tactique des États-Unis aussi bien que sur les contradictions dans le comportement des politiciens américains. Les participants du séminaire ont accordé une attention particulière à l’opinion du speaker concernant la position de la Chine a l’égard des révolutions colorées en Afrique.
En répondant aux questions, le président de la Fondation a indiqué que dans leur activité visant l’incitation des révolutions colorées, les États occidentaux étaient souvent guidés par la logique de « si je ne peux pas t’avoir, personne ne pourra ». En réponse à l’élargissement de la présence chinoise dans les zones traditionnelles d’influence des États-Unis et de leurs alliés, les États du continent noir sont soumis au chaos à cause des révolutions colorées. En même temps, le chaos apporte des avantages aux pays européens. Dans ces conditions, il est impossible de définir, jusqu’au dernier moment, sur quelle force politique mise l’Occident. Cela ouvre les possibilités pour la manipulation politique et nivèle les efforts d’autres acteurs de stabiliser la situation.
D’après Aleksandr Malkevitch, les tentatives d’organiser de l’extérieur une révolution colorée ou un coup d’État classique peuvent également servir d’une alerte aux États essayant de déstabiliser la situation dans la région. La tentative récente de la prise armée du pouvoir en Éthiopie peut être une réaction de l’Occident a la participation d’Addis-Abeba en tant qu’intermédiaire dans les négociations entre le gouvernement et l’opposition.
L’absence d’une réaction aiguë de la part de la Chine à la destruction des résultats de son intervention en Afrique soulève des questions. Peut-être, Pékin compte qu’après les revolutions colorées les États africains imposeront le contrôle sur les sources de matières premières et les voies de leur transportation, tandis que les autres éléments de l’économie des pays concernés seront laissés à la Chine.
En répondant a la question, pourquoi les États-Unis appuient-ils souvent les révolutions colorées qui sont contraires à leurs intérêts nationaux, l’expert a porté l’attention à la nécessite de différencier la politique d’État et celle des groupes élitaires. La conception deep state est bien fondée. Il n’est pas par hasard que dans la plupart des manuels modernes de sciences politiques édités dans les pays occidentaux on ne mentionne pas les régimes démocratiques. Il s’agit des polyarchies, des systèmes a l’intérieur desquels le véritable pouvoir appartient aux élites qui doivent toutefois tenir compte des intérêts des citoyens et respecter les procédures démocratiques. Les groupes d’establishment ont souvent les intérêts tout à fait opposés. Ces contradictions se reflètent dans la politique extérieure et intérieure des pays respectifs.
En expliquant la croissance du risque de la répétition des révolutions colorées dans les pays de l’Afrique du Nord, Aleksandr Malkevitch a souligné que les organisateurs de ces révolutions suivaient une approche systématique et ne laissaient jamais leurs projets incomplets. La tentative échouée d’un coup sera invariablement suivie par une nouvelle tentative jusqu’à ce que les organisateurs n’aient pas atteint leurs objectifs. En même temps, ils procèdent toujours avec les mêmes moyens. Ceux-ci ne sont que légèrement modifiés pour convenir aux spécificités du pays. L’expert a également porté attention à la faute commune des élites étatiques devenues l’objet des révolutions colorées : ils croient sincèrement aux engagements avec l’Ouest et la solidité de ses garanties.
Au cours de la discussion, la conversation s’est tournée vers la question des révolutions colorées dans l’espace post-soviétique. Aleksandr Malkevitch a attiré l’attention sur le fait que la Russie est en fait entourée d’un anneau de pays qui ont traversé les révolutions colorées. Un certain nombre d’États post-soviétiques, tels que la Biélorussie et l’Azerbaïdjan, ont réussi à établir une immunité contre cette menace, mais la plupart des anciennes républiques alliées ont une faible résistance à celle-ci. Un exemple de ceci est le Kirghizistan, où la troisième révolution colorée pourrait bien commencer.
La question de la coopération entre la Russie et les pays africains a également été largement débattue. Selon Aleksandr Malkevitch, Moscou a les ressources nécessaires pour influencer la situation en Afrique. De nombreux représentants des élites africaines ont déjà reçu des études supérieures en URSS et puis en Russie et ont des sentiments chaleureux envers ce pays. Il existe notamment des associations formelles d’anciens étudiants africains devenus par la suite de grands fonctionnaires, hommes d’affaires ou personnalités publiques. Les représentants de l’ancienne génération n’ont pas oublié l’aide que l’Union soviétique a apportée aux pays d’Afrique et sont vraiment reconnaissants de ce soutien. De même, les Africains n’ont pas oublié que la Russie est l’une des rares grandes puissances à ne pas avoir participé à la colonisation de l’Afrique. Cependant, la Russie a vraiment besoin de comprendre ce que les États d’Afrique attendent d’elle.
Afin d’obtenir une réponse à cette question, le président de la Fondation a invité les participants du séminaire à assister aux prochaines réunions du Club africain de discussion. Il est également prévu de se rencontrer dans le cadre du Club le groupe d’ambassadeurs de The Intergovernmental Authority on Development. C’est un bloc commercial et économique réunissant huit États : l’Éthiopie, Djibouti, l’Érythrée, l’Ouganda, le Soudan du Sud, la Somalie et le Kenya.
Il n’est pas exclu que dans le cadre d’un futur brainstorming potentiel les experts russes seront en mesure de proposer leurs solutions à une partie de problèmes auxquels sont confrontés aujourd’hui les États du continent africain.
« L’Afrique se transforme en un nouveau monstre géopolitique. Il n’y a pas encore d’Afrique unie, mais le bassin « Afrique – le reste du monde » existe certainement.
La Russie a non seulement perdu des « points d’entrée » en Afrique, mais aussi l’institut général pour l’étude opérationnelle des processus publics et politiques en Afrique. Ne soyez pas déçus, chers africanistes, les universités qui accueillent des étudiants d’Afrique. Toutes ces actions ou initiatives sont faites sur l’enthousiasme, sont une goutte dans la mer. En Afrique on se souvient de la Russie. Un grand nombre d’officiers des pays africains ont reçu une formation soviétique. Ils se souviennent avec nostalgie de la Russie, ils aiment notre pays et c’est normal.
Notre retard stratégique en interaction avec l’Afrique est expliqué par deux raisons : il n’y avait pas d’intérêt pour l’Afrique de la part des entreprises russes ; il n’y a pas de tendances gouvernementales (demandes d’emploi) en Afrique.
Que veut la Russie de l’Afrique ? Qu’est-ce que la Russie peut offrir à l’Afrique ? Pour résoudre ces problèmes, il est nécessaire de commencer très soigneusement. Après tout, l’Afrique a changé, mais les demandes sont restées les mêmes : « donnez-nous de l’argent ». Ma conviction profonde est que nous devons investir exclusivement dans notre pays. Alors, que pouvons-nous offrir : un modèle d’appareil gouvernemental, des technologies innovantes si nous en avons, des coentreprises.
L’Afrique est une Terra Incognita, où il y a à la fois des points d’application des intérêts des entreprises russes et la possibilité d’essayer de nouvelles initiatives géopolitiques. Il suffit de prendre cela au sérieux, sans regarder en arrière sur l’expérience des prédécesseurs, sans regarder les problèmes sur le continent d’autres pays, en pensant uniquement aux intérêts de la Russie et en travaillant sur ce chemin », a déclaré Aleksandr Malkevitch.